Tout un monde ! texte intégral
Tout un monde !
(Mélange de doux et d’amer.)
1_Beau Temps
Oui, dans la nature, par temps merveilleux, rient
Comme des enfants, la cascade et le torrent,
Mais, quand sur les toits, le tam-tam assourdissant
De l’averse retentit, les oiseaux s’ennuient.
Dans mon monde, voyez, les pauvres, eux, sourient,
Appréciant la nourriture, l’instant présent,
Tandis que les riches, plus près de leur argent,
Pour un rien, s’inquiètent, chaque jour, se soucient…
Il est des eaux douces, d’autres au goût amer,
Et les rivières se déversent dans la mer ;
L’argile, l’esprit et l’eau font un bon mélange.
Seul le Temps est maître, incorruptible gardien :
Il nous réunit tous, dans le creux de sa main,
Quand vient le jour sombre, pour le démon et l’ange.
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2_Le divin enclos
On rêve tous, d’un grand jardin, c’est étrange,
Où nous irons alors, las, peut-être demain,
Quand nous n’aurons plus rien, de charnel, ni d’humain,
Pour voyager dans le ciel ou dans cette fange !
Pourrons-nous entendre, le chant et la louange,
La voix mélodieuse, de ce séraphin,
Voir les petites ailes de ce chérubin,
Qui, de quatre créatures, est un mélange.
Libres de tout licol, dans ce divin enclos,
Où la brebis et l’Agneau prendront du repos,
Ils ne seront plus semblables, les fils des hommes,
Aux fruits qui tombent et qui pourrissent, des pommes,
Quand s’approche le Temps, père de grands fléaux,
Lui qui pourtant demeure, remède à nos maux.
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3_Le souterrain
Satan félicite, ses fidèles suppôts,
Leur faisant miroiter, richesses et royaumes,
Mais ne leur réserve, que le feu pour les chaumes ;
Ils seront affinés, tel l’or mis en dépôts !
Dans son antre, il dessine, frontières, drapeaux ;
La Terre il pervertit, on en voit les symptômes :
Amour, solidarité deviennent fantômes,
Haine, animosité, leitmotivs de troupeaux.
Princes des ténèbres, depuis son souterrain,
Jeté là par le Roi, guide-t-il son pantin,
Qui rêve d’un renom, et lui cède son âme.
Et les anges pleurent, quand sourit le malin,
Qui dit au mécréant, faire le mal c’est bien,
Lui, serpent originel, le diable, l’infâme.
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4_ Un fruit si doux
Si la Terre enfante, c’est la première femme,
Qui prit forme jadis, avec l’Etre divin,
Plaçant en son sein, ce magnifique jardin
Celui dont nous rêvons ( ?), mais où se joua le drame !
Le serpent envoûta, leurra, trompa la dame
Qui, ne se doutant de son infernal dessein,
Avec l’époux mangea, scellant notre destin ;
Depuis, tel un pagne, flotte sur nous le blâme.
Ecouter le menteur, cela coûte très cher,
A l’argile et l’eau, mélange qui s’est fait chair ;
(Lui prêtant attention, allant jusqu’à le croire !)
A sa fontaine, le venin, fallait-il boire,
Même s’il avait, oui, belle allure, bon air ?
Il est des fruits si doux, laissant un goût amer !
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5_Chacun chez soi
Chacun son univers, chacun son territoire,
Les grands monstres marins, évoluent dans l’amer,
Non dans le poème, dans la terre est le ver
Et nos souvenirs vivent dans la mémoire ;
Les héros de jadis, quittent parfois l’histoire,
Laisse aussi l’abîme, le prince Lucifer,
Les chefs militaires, délaissent le bunker
Quand résonne le cor, annonça la victoire…
Chez la Souveraine, se reposent les morts,
Tandis qu’en poussière, se transforment les corps,
La morte semence, différente de l’âme.
Vraiment dans les cryptes, là dorment des trésors,
Dans des prisons de bois, véritable coffres-forts,
De beaux écrins parfois, réservés pour la flamme.
6_La Souveraine
On la dit très laide, mais pourtant, à son charme
Tous on succombera, tôt ou tard, c’est ainsi,
Quand viendra le temps où s’achève le sursis,
Quand la Fatalité, dégainera son arme.
Alors, tel ce tam-tam sur les toits, le vacarme
Assourdissant se fera-t-il entendre ici,
Le cri des pleureuses, bruit d’un ciel obscurci
Que l’orage déchire, cœur versant sa larme.
Tous les jours, Elle récupère le bois mort,
Qu’elle a repéré du haut de son mirador,
Et qu’elle s’empresse, dans son triste domaine,
D’entreposer là, tel quel, sans le moindre effort :
Aucune chandelle, nulle fleur, nul décor !
Elle a son État, point d’âme, la Souveraine.
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7_Mélanges & confusions
Voyez, le chaud et le froid, l’amour et la haine
Point ne se confondent, ni le faible et le fort,
La case et le château, la raison et le tort,
Le silence et le bruit, la colline et la plaine,
Le dessus et le dessous, la joie et la peine,
La surface et le trou, (là, le silence est d’or !),
La demeure où l’on vit, la dernière où l’on dort,
L’ombre et la lumière, le sujet et la reine.
Si le jaune et le bleu, forment toujours le vert,
Le noir et le blanc, ne font pas du gris, c’est clair !
L’ivoire et l’ébène font une mélodie.
Est-ce le soleil seul, qui colore l’éther,
Quand, au crépuscule, plonge-t-il dans l’amer !
Le métissage n’est point une tragédie.
8_Guère de territoire
On participe à cette triste comédie :
Transformer la Terre en un immense désert,
Sans un arbre pour l’oxygène et le pic-vert…
Puis on rêve devant notre encyclopédie,
Ou notre écran, d’une autre Terre, « parodie »
De celle-ci, là quelque part, dans l’univers
Craignant des Colomb qui diront : « j’ai découvert ! »,
Un nouveau monde sans maux, crime, maladie.
Mais, si dans les westerns, on chasse les indiens,
Dans l’espace, on voyagera chez les martiens,
Pour la plus grande, plus fabuleuse conquête.
Sauront-ils alors, réduits à l’état de « chiens »,
Oui, de sous-race, ce que valent les humains,
Eux qui traitent leur semblable comme une bête !
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9_ Partage & pardon
Alors ils diront : « Regardez-nous ces vauriens,
Ils épuisent les ressources de leur planète,
S’enrichissent et nous devrons payer la dette,
Nous qui ne récoltons, que des miettes, des riens ! »
N’en-est-il pas ainsi, depuis des temps anciens,
Non, aucun partage, est-ce une bonne recette ?
Le pauvre veut du pain quand le riche s’inquiète
De sa petite personne, de tous ses biens.
Tendre la main, est-ce pour recevoir des coups,
Les jougs et les fers, est-ce collier pour les cous ?
On désire vivre, mais la mort, on nous donne.
Ils assassinent en riant, mais ils sont fous ;
Ils crucifient le Juste, avec mépris et clous,
Oui, Celui-ci qui demande que l’on pardonne !
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10_ De boue ?
Face à cette vérité, que nul ne s’étonne :
Nous sommes des hommes de boue et bien debout ;
Misère est un tunnel dont on ne voit le bout,
Fosse sans lumière, où le prisonnier raisonne.
« Assise auprès du feu », Souveraine chantonne :
« Jeunes comme adultes, tous redoutent le trou,
Mais finiront bien par y descendre après tout !»
Quand ils y tombent, le chant funeste résonne.
Regardez donc l’argile séchée au soleil,
Pour le modelage, sûr, elle est sans pareil,
On en fait des œuvres, de couleurs et de formes,
Ma foi si diverses, ne bougeant point l’orteil,
Les bras et la tête, sans l’avisé conseil,
D’un Roi, Père bien plus grand, plus vieux que les ormes.
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11_Pour faire un monde
Pour faire un monde, il faut des quantités énormes,
De bons sentiments, joie, amour, paix, et d’orgueil,
De tendresse, de peintures : blanc, noir, vermeil…
De sincères respects, pour les êtres difformes,
Ceux-là qui ne correspondent point à nos normes :
Soyons tolérants, gardons nos sens en éveil,
Car nous voyons que chaque matin, au réveil,
L’astre brille pour tous, gros, petits, filiformes…
Il faut de la compassion, moins de moquerie,
Des cachots pour enfermer tous nos mots blessants,
Il faudrait que l’on redevienne des enfants,
Ignorant tout le mal, que recèle la vie.
Rassemblons-nous ; tous ensemble, entonnons des chants,
Oublions les guerres, et les hommes méchants.
12_ Mariages & Divorces
Mais dans mon monde, absolument tout se marie
S épouse : les couleurs, la terre et l’eau, les gens,
Même le doux et l’amer dans les océans,
Et dans le lit, un homme à sa femme, s’allie.
Pourquoi celui qui possède point ne s’unie,
Aux pauvres miséreux, mendiants, ces indigents ;
Celui dont la peau rappelle les hivers blancs,
Méprise le fils du soleil à peau brunie ?
Il est des hommes biens, avec l’esprit ouvert,
D’autres qui respirent le mal comme Lucifer,
Des êtres sans raison, refusant les mélanges.
Dans le reste d’un magnifique jardin, vert,
Où, l’argile et l’eau créèrent jadis la chair,
Oui, dans mon monde, des démons côtoient des anges.
©Rénorin Laurent, 2015
10/06/15
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